Les victimes sont plus souvent des femmes
Les enquêtes, les entretiens ou encore les ouvrages faits sur le sujet montrent que la violence sexuelle et sexiste touche quasi-exclusivement les femmes. Nous n’allons pas aborder ici l’historique de la suprématie des hommes sur les femmes qui perdure depuis des siècles : il reste cependant qu’elle est une clé de l’explication des violences. Marie-France Hirigoyen [1] remarque, concernant le harcèlement moral, que « non seulement les femmes sont davantage victimes, mais on les harcèle différemment des hommes : les connotations machistes ou sexistes sont souvent présentes ».
D’un point de vue sociologique, la violence sexuelle est l’expression d’un rapport social fondé sur le mépris, la domination, la possession, la négation de l’autre : du plus fort (ou qui se considère comme tel) sur le plus faible (idem). Michèle Ferrand [2] analyse ainsi le viol : « Loin de constituer une exception aberrante à mettre au compte de la perversité de quelques hommes, le viol met au jour, en poussant à la limite, la logique du sexisme dominant qui fait de la femme – ou d’un être inférieur – un sexe à prendre, refusant de prendre en compte le désir de l’autre ».
Toujours pour Michèle Ferrand, la reconnaissance (certes tardive) du harcèlement sexuel comme violence sexuelle - qui se manifeste par des gestes, attitudes et paroles - a un impact symbolique important. En effet, elle souligne que « le viol et les violences en général, le sexisme et le harcèlement sexuel s’inscrivent dans un ensemble de pratiques, qui n’a rien à voir avec des « pulsions biologiques » mais bien davantage avec la construction culturelle des inégalités hommes/femmes ».
La situation de précarité augmente les risques
On peut donc, à l’appui de l’analyse de Michèle Ferrand, déduire que si toutes les femmes sont potentiellement des victimes, d’autres facteurs augmentent pour certaines d’entre elles les risques d’être touchées. La profession, le statut de l’emploi, notamment les statuts précaires, la régularité du séjour en France pour les étrangères, aggravent les risques encourus : les femmes jeunes et célibataires cumulent ainsi tous les facteurs de risque. Une étude de Françoise Mileski [3] montre ainsi les catégories les plus fragiles : femmes seules avec enfants, femmes immigrées, femmes allocataires de minima sociaux. Maryse Jaspard note aussi que « dans le cadre du travail, qu’elle ait cédé après une longue phase de harcèlement ou qu’elle ait été violée subitement, par surprise, la victime est d’autant plus captive que sa situation est précaire. »
En outre, l’enquête INSEE 2008 [4] sur les violences faites aux femmes indique que parmi les femmes sans diplôme, il y a cinq fois plus de victimes d’agressions sexuelles en dehors du ménage que chez les plus diplômées : l’enquête ne précise pas cependant le pourcentage sur le lieu de travail.